Édito #27- versus Rousseau ou le chauvinisme atlantiste

Lors du débat Jadot /Rousseau du 23 septembre, nous avons vu, stupéfaits, deux candidats d’un courant « plus ou moins à gauche » faire assaut de chauvinisme pour défendre la participation de la France à la croisade anti-chinoise conduite par Biden. Un véritable concours de servilité. Si nous prêtons une brève attention à cette séquence, c’est parce qu’elle est révélatrice des avatars du chauvinisme impérialiste français.

Le chauvinisme étalé dimanche par les deux postulants se veut élégant, raffiné, loin de toute vulgarité nationaliste. Le nationalisme, c’est bon pour le bas peuple, c’est ce qui ronge ces classes populaires qui refusent l’Europe, au point d’en avoir rejeté la Constitution au referendum de 2005. Ainsi, tout au long de la soirée, nos deux candidats se sont drapés sous les plis du drapeau de l’Union Européenne pour dissimuler un chauvinisme bon teint mais foncier.

Ce chauvinisme antipatriotique est un trait majeur des classes dirigeantes françaises, qui se sont toujours réfugiées chez les puissants de l’extérieur pour faire la guerre à leur propre peuple. C’est Coblence contre Valmy, c’est la fuite de Varennes. C’est Thiers dans les bras de Bismarck contre la Commune de Paris, Pétain dans ceux d’Hitler pour écraser les rouges du Front populaire. Ce chauvinisme typiquement BBR s’abrite cependant derrière une bonne morale. Si la capitulation du pays est nécessaire c’est parce que celui-ci a péché. Pétain justifiait l’armistice hitlérien en invoquant les fautes commises par la République, notamment lors du Front populaire. La faute, pour Sandrine Rousseau, c’est donc d’avoir voulu faire cavalier seul, de négliger les alliances, européennes et atlantistes. La faute pour Jadot, c’est d’avoir signé en décembre dernier l’accord d’investissement avec la Chine contre l’avis des Etats-Unis. La France est donc punie, « parce qu’elle n’est pas un allié fiable » (Jadot). Il lui faut dès lors s’abandonner tout entière à la protection de plus puissant qu’elle.

Une bonne partie de la gauche a depuis longtemps accepté ce chauvinisme de soumission et de collaboration. Son antinationalisme n’est qu’une façade pour cacher son engagement atlantiste sans réserve. Nous sommes tous américains titraient Le Monde au lendemain des attentats du 11 septembre. En 1966, C’est Mitterrand qui s’opposait farouchement à de Gaulle lorsque celui-ci décidait de quitter le commandement militaire de l’OTAN.

Jadot et Rousseau n’avaient donc que l’Europe à la bouche, leur chauvinisme élégant consistant à cacher le drapeau tricolore dans les plis du drapeau européen, pour que la France puisse continuer à caracoler en Afrique et dans le Pacifique, sous protection états-unienne, seule bannière acceptable. La France intervenant seule au Sahel, c’est du nationalisme. Mais guerroyer sous le drapeau européen, c’est un acte de civilisation. La France vendant seule des sous-marins à l’Australie, c’est ignoble (Rousseau a beaucoup insisté sur ce point), mais vendre sa camelote meurtrière sous l’égide de l’alliance indo-pacifique de Biden, c’est un acte de civilisation pour contrer « l’agressivité de la Chine » (l’obsession de Jadot). La crise australienne a ainsi été l’occasion de réchauffer la doctrine de la « défense européenne » qui sera le mantra de la présidence française de l’UE en janvier prochain. On sait que ce concept n’a rien de stratégique et qu’il ne sert qu’à couvrir les tractations entre les divers marchands d’armes européens et états-uniens. Car la « défense européenne » est solidement ancrée dans l’Alliance atlantique, comme n’ont cessé de le rappeler Le Drian, Parly, et Macron lors de son coup de fil réparateur à l’oncle Joe.

Si Jadot et Rousseau, dignes représentants de leurs cousins du PS voient dans cet événement non pas une occasion de renforcer le combat anti-impérialiste, mais un prétexte pour se soumettre encore davantage aux USA, nous devons, quant à nous, nous en réjouir, en exigeant la sortie de l’OTAN et le départ des troupes françaises de l’Afrique et du Pacifique. Cela nécessite de rendre leur terre aux peuples colonisés qui n’ont que faire de la croisade antichinoise des Etats-Unis et de la France. Si nous étions vicieux, nous ajouterions que rendre leurs terres aux peuples colonisés n’est ni plus ni moins qu’un projet écologique. Mais il semblerait que même du point de vue écologique, Jadot et Rousseau soient des bouffons.

 

 

 

 

 

 

 

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